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Lé Rwa Bwar ! (Le roi boit !)

L’on connaît tous l’ Epiphanie ou La Galette des Rois qui se célèbrent le premier dimanche de janvier (si ce n’est pas le 01 bien entendu). Et bien, chez nous, à l’ île Maurice, nous célébrons : Lé Rwa bwar ! Littéralement : le roi boit ! Est-ce une allusion aux rois mages, nul ne saurait vraiment le dire mais nous apprenons de nos anciens qu ‘il s’agit d’une vieille tradition selon laquelle les mauriciens fêtent ‘royalement’ avant la grande reprise de janvier. Une façon sans doute, d’exorciser le stress accumulé pendant toute l’année écoulée et de se motiver pour l’année à venir.

Il paraît que dans le temps, faute de moyens, l’on vivait chichement et sans excès le reste de l’année. Il y avait dans les familles, beaucoup de bouches à nourrir, les temps étaient dûrs et les salaires maigres (souvent un salaire uniquement par foyer, les femmes s’occupant des enfants à la maison). De ce fait, en ce fameux dimanche de janvier, c’ était là l’occasion de se lâcher et d’ oublier les privations et les contraintes du reste de l’année. L’on utilisait ses petites économies ou les petits billets reçus en cadeau le 01 janvier pour fêter comme il se devait “Lé Rwa Bwar “!! Toute la famille mettait la main à la pâte.

Direction: une plage du littoral non sans avoir assisté au préalable, à la messe de l’Epiphanie.

En bons mauriciens, les mets que l’ on savourait ce jour là, étaient préparés avec le plus grand soin. Au menu:   l’ incontournable curry de poulet accompagné de riz, de salades, chutneys ou achards (condiments que l’on aura pris la peine de confectionner des semaines auparavant). Nos anciens nous confient que le poulet était dans le temps une denrée rare pour la plupart des familles. Il trônait sur les tables lors des grandes fêtes uniquement!
Certains se payaient le luxe de mettre à la casserole le canard ou la dinde élevés dans leur propre cour des mois durant. Les traditionnels amuse-gueules bien mauriciens ne seront pas en reste. Le déssert, quant à lui, sera bien souvent le partage de nos litchis ou mangues cueillis le matin même ou la compote de papayes du jardin dont seule grand-mère avait le secret !

C’est une grande fête familiale où grand-parents, parents, enfants, oncles, tantes, cousins étaient tous présents dans la joie de partager une journée à la mer. Les bons petits plats se partageaient avec bienveillance tandis que les boissons coulaient à flots.

En ce fameux jour, les excès étaient permis, ce qui donnaient lieu à un lendemain plutôt difficile car cette fête clotûrait les festivités de fin d’année, la dernière avant le dimanche de Pâques.   Il fallait donc savourer chaque instant !

Entre les bains de mer, les parties de cartes ou de dominos sous les filaos, les jeux ponctués par les cris de joie des enfants, les conversations animées des adultes, les histoires croustillantes d’antan des ainés, …. cette journée se dirigeait tout doucement vers sa fin.  Mais “Lé Rwa Bwar” ne saurait être parfaite si elle ne se terminait au coucher du soleil par un petit pas de danse, pieds nus sur la plage.

Dans le temps toute la famille unissait leur voix au son des ravannes chauffées au feu de bois.  A défaut de ravannes, les bouteilles vides et les cuillères faisaient bien  l’ affaire, se rappellait le grand-père avec nostalgie.  Il y avait dans chaque famille, un oncle ou une tante que l’ on sollicitait toujours pour pousser la chansonette.  Nul besoin de dire qu’ ils ne se faisaient nullement prier !

De nos jours, si certaines familles fêtent encore “Lé Rwa Bwar” pour faire perdurer la tradition, ce serait plutôt autour d’ un barbecue entre amis, voisins et parents.

Dans les assiettes, le poulet rivalisera certainement, selon les moyens de chacun, avec d’autres mets délicieux d’horizons divers, bryani, paëlla, nouilles sautées….

Le téléphone portable branché au haut-parleur hi-tech aura remplacé les instruments traditionnels et diffusera les derniers tubes à la mode pour permettre à tous de se déhancher jusqu’à l’ aube.

Et quid des excès….et bien, c’est vous qui voyez ! Une chose est sûre: le lendemain est toujours une épreuve à vivre!

Bonne reprise à tous !

NadElle

Banané (Bonne Année)
Un dessert avec Rosa (t)